Le quotidien de nombreux ressortissants haïtiens est souvent difficile à travers le monde. Le cas de Brenor Joseph est un exemple. Ce dernier vit dans l’incertitude quant à son statut en Jamaïque où il attend depuis plus de deux ans les documents nécessaires pour valider sa résidence sur l’île.
Cet Haïtien s’inquiète chaque jour de se faire expulser alors qu’il a passé la majeure partie de sa vie d’adulte à fuir. “ La plupart des Haïtiens fuient Haïti pour aller n’importe où. C’est comme si le peuple ne s’était jamais battu pour l’indépendance”, s’indigne M. Joseph au micro de Jamaica Observer.
L’homme d’âge moyen a dû s’enfuir en raison de la violence des gangs. Il a déclaré qu’il avait quitté Haïti en 2023 après une expérience de mort imminente, voyageant en bateau pendant trois jours avec des nourrissons et des familles à bord.
Le groupe de voyageurs avait prévu d’atteindre Cuba, mais a dérivé dans les eaux jamaïcaines. “Après notre arrivée, nous avons passé six mois en confinement. C’était très difficile. Nous fuyions le danger, puis nous étions en prison”, a-t-il expliqué.
M. Joseph a déclaré que, bien que lui et d’autres gens aient été libérés dans des logements un peu meilleurs, on leur a promis des permis de travail et des documents qui ne se sont jamais concrétisés depuis lors.
“ L’immigration a pris nos empreintes digitales et a dit que nous obtiendrions des papiers pour pouvoir travailler. Deux ans plus tard, rien. Nous travaillons parce que les gens nous aident, mais nous ne pouvons pas laisser voir notre identification. N’importe quel policier peut nous arrêter », se lamente-t-il.
Le ressortissant haïtien a confié au journal que les migrants haïtiens ont attendu beaucoup plus longtemps que d’autres nationalités pour obtenir des documents.
“Vous avez des Cubains qui viennent après nous, et ils ont des papiers au travail, mais nous, les Haïtiens, n’obtenons rien. Je ne vais pas dire que la Jamaïque a quelque chose contre les Haïtiens, mais je sais que la Jamaïque ne nous donne pas de papiers pour travailler. Nous avons l’impression d’être toujours en danger d’être renvoyés à tout moment”, a-t-il indiqué.
Un avocat
Le procureur, Dr Marcus Goffe, qui représente Joseph et plusieurs autres Haïtiens vivant actuellement dans différentes zones à travers la Jamaïque, affirme qu’il y a un « effort systématique » des autorités jamaïcaines pour refuser aux migrants haïtiens l’accès à une procédure régulière, accusant l’État de violer à la fois le droit international sur les réfugiés et la propre constitution de la Jamaïque.
Plus loin, il a déclaré que le traitement par le gouvernement des récentes arrivées de bateaux en Haïti s’est « éloigné » des obligations énoncées dans la Convention des Nations Unies pour les réfugiés, dont la Jamaïque est signataire.
« Lorsque les Haïtiens arrivent, la police les emmène pour des contrôles de santé initiaux, ce qui est bien. Mais après cela, les avocats sont bloqués. On nous refuse l’accès aux centres de santé, on nous refuse l’accès aux postes de police, et les agents d’immigration de Passport, Immigration Citizenship Agency (PICA) mènent des entretiens en secret”, révèle l’avocat, précisant que ces entretiens deviennent la base d’expulsions rapides, souvent aux premières heures du matin.
“ Nous recevons des plaintes répétées selon lesquelles les interprètes disent aux migrants de se taire, leur disent qu’ils ne peuvent pas rester ici ou font pression sur eux pour qu’ils ne déposent pas de réclamations ”, a déclaré Goffe. « Comment quelqu’un peut-il défendre ses droits s’il ne parle pas la langue et que la personne chargée de l’aider le pousse à abandonner ? » a poursuivi l’homme de droit, critiquant l’utilisation par le gouvernement de lois obsolètes de l’époque coloniale telles que la loi sur les étrangers, qui permet aux autorités de l’immigration de juger que les personnes « non débarquées » même lorsqu’elles sont physiquement en Jamaïque – une faille qui, selon lui, est utilisée pour contourner les protections constitutionnelles.
À souligner, Brenor Joseph a deux enfants au Texas, aux États-Unis, d’où il a été expulsé en 2013. En difficulté en Jamaïque, le fils du terroir dit rêver d’une journée où son esprit sera à l’aise, libre de peur. “ Aujourd’hui, je pourrais être ici, demain ils pourraient venir nous chercher pour ramener tout le monde. Si la police veut vous arrêter, elle vous arrête, parce que nous n’avons pas de pièce d’identité ou quoi que ce soit”, explique-t-il.
L’un des cas de multiples ressortissants haïtiens qui fuient le pays à la recherche d’une vie meilleure ailleurs, en raison de l’instabilité politique, des problèmes économiques et surtout de la violence des gangs qui ravage la société.
Brenor Joseph, originaire d’Haïti, raconte son arrivée en Jamaïque en 2023 après avoir fui la violence dans son pays d’origine dans une récente interview accordée au Jamaica Observer. (Photo : Llewellyn Wynter)
