Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a publié un rapport sur l’appareil judiciaire haïtien et les conditions dans les centres de détention. Entre 2023 et 2024, au moins 11 personnes ont été exécutées sommairement par le commissaire du gouvernement près le Tribunal de Première Instance de Miragoâne, Jean Ernest Muscadin, selon le RNDDH.
Dans ce document de 38 pages, qui dépeint un appareil judiciaire en crise et des conditions de détention inhumaines, le Réseau explique la manière dont le magistrat Jean Ernest Muscadin a réalisé ses forfaits et a ensuite présenté les victimes comme membres de gangs armés.
Ces 11 nouvelles exécutions sommaires portent à vingt (20) le nombre de personnes abattues par le chef du parquet de Miragoâne, dans “l’irrespect de leurs garanties judiciaires”.
Le RNDDH souligne également que le magistrat Jean Ernest Muscadin échappe totalement au contrôle de son ministère de tutelle. “De plus, il ne veut aucunement s’investir dans la recherche de la vérité sur les crimes perpétrés dans sa juridiction au nom de la vindicte publique, en vue de parvenir à la condamnation des bandits armés et au dédommagement des victimes de ces derniers ”, peut-on lire dans ce rapport.
Appareil judiciaire et conditions de vie précaires dans les prisons
Le Réseau National de Défense des Droits Humains décrit une situation catastrophique au sein de l’appareil judiciaire et des conditions de détention qui violent systématiquement les garanties judiciaires des détenus au cours de l’année judiciaire 2023-2024.
Sur l’ensemble du territoire national, 15 Tribunaux de Première Instance ont organisé des audiences criminelles durant lesquelles 228 cas ont été entendus. En revanche, 49 autres cas ont été renvoyés, ce qui a conduit 113 détenus à retourner en prison sans avoir été fixés sur leur sort. Sur les personnes jugées, 148 ont été condamnées et 93 acquittées, selon les précisions du RNDDH.
Décès de détenus
Entre janvier et octobre 2024, 98 détenus sont décédés, selon le RNDDH, qui souligne que le manque de nourriture et l’absence de soins de santé, y compris de médicaments, ont contribué à ces décès.
En outre, le RNDDH a attiré l’attention sur la non-certification des juges par le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, ce qui réduit le nombre de magistrats au sein de l’appareil judiciaire, en l’absence de nouvelles nominations. Cette situation entrave davantage le fonctionnement de la justice.
Face à cette situation, le RNDDH formule plusieurs recommandations pour y remédier. Il demande aux chefs de la juridiction de fournir une liste de tous les détenus en détention préventive depuis plusieurs années, afin de faciliter le suivi de leurs dossiers, et demande que les juges d’instruction se prononcent sur les dossiers en attente dans leurs cabinets.
Le RNDDH recommande également d’émettre des instructions formelles pour organiser, tout au long de l’année judiciaire 2024-2025, des audiences correctionnelles et criminelles, et de reprendre le contrôle des infrastructures judiciaires situées dans les zones contrôlées par des gangs armés.
Wilder Sylvain